La vie sur terre commença grâce aux micro-organismes tels que les bactéries. Ces premières formes de vie datent d'au moins 3,6 milliards d'années. Aujourd’hui, les microorganismes sont présents partout et représentent 2/3 de la biomasse.

Le microbiote représente l´ensemble des micro-organismes vivants dans un environnement précis. Les micro-organismes, chez l’homme, sont associés aux épithéliums de revêtement de notre corps (muqueuses et peau). On les retrouve dans l’intestin, sur la surface oculaire, les voies respiratoires et génito-urinaires, même le lait maternel contient de micro-organismes!

Le microbiote le plus important par sa magnitude est le microbiote intestinal. Dans notre tractus digestif, nous avons 100 000 milliards de micro-organismes (10 puissance 14). La majorité se retrouve dans l´iléon et le colon. Leur nombre impressionnant dépasse de 10 fois le nombres de cellules de notre corps tout entier! En poids, elles représentent 2kg de matière (le poids d´un grand organe!) et 40% du poids de nos selles. On comprend maintenant comment une altération de notre microbiote (disbiose) peut se traduire par une constipation!

Notre intestin est un organe crucial pour notre corps. Il a son propre système nerveux: le système nerveux entérique avec plus de 100 millions de neurones. L´intestin produit plus de 70% de la sérotonine (l´hormone du bonheur) de notre corps. L´intestin a aussi une activité endocrine, métabolique et immunologique importante. Toutes ces activités servent à la digestion de nos aliments et à nous protéger des micro-organismes pathogènes pouvant s´introduire dans notre corps avec les aliments. 70% de nos cellules immunitaires se trouvent dans l´intestin!

Grâce aux études menées ces derniers 10 années, nous reconnaissons maintenant le rôle important que joue notre microbiote intestinal. Il aide à la digestion certes, mais saviez-vous qu’il module votre réponse aux inflammations même au niveau des articulations et de l’oeil? Il produit des hormones, sert à détoxifier certains aliments et  nous protège de certains cancers.  Son activité est celle d’un organe à part entière avec une activité métabolique aussi importante que celle du foie. Nous ne commençons à l’heure actuelle qu’à entrevoir son importance. Ses constituantes et les interactions sont difficiles à apprécier. En laboratoire nous n’arrivons à peine à cultiver et caractériser que 400 espèces de micro-organismes. Par les techniques d´analyse génétique développées dans les années 90, nous savons qu’il y a plus de 2000 espèces de microorganismes qui cohabitent dans notre intestin (1/3 communs à tous, 2/3 propres à chacun) contenant 150 fois plus de gènes (métagénome) que nos chromosomes!

La diversité génétique à l’intérieur de notre microbiote est bien plus grande que celle de nos cellules. Notre microbiote intestinal est à 98% bactérien mais on trouve aussi des levures et des protozoaires. Nous sommes génétiquement identiques à 99,9% mais les micro-organismes qui nous habitent peuvent différer de 80-90 %.

Nos premiers micro-organismes nous viennent de notre mère. Lors d'un accouchement par voie naturelle, les micro-organismes colonisent notre intestin au moment de la rupture de la poche amniotique, lors du passage par le vagin, du contact avec la peau de la mère, des tétées et enfin via l'environnement.

Après quelques jours et à cause de leur très grande vitesse de multiplication (une seule bactérie peut avoir 300 millions de descendants en 24h !), cette colonisation se traduit par la présence de quelques centaines de milliards de bactéries dans le côlon.

Une dysbiose représente un déséquilibre qualitatif et/ou quantitatif du microbiote intestinal. Si vous prenez régulièrement des antibiotiques ou si vous avez des troubles gastrointestinaux tels que ballonnements, diarrhées, constipations... vous souffrez probablement une altération de votre microbiote.

Aujourd´hui, beaucoup souffrent de symptômes reliés à l’intestin. On parle du syndrome de l´intestin irritable « colopathie fonctionnelle » ou « colon spasmodique » qui affectent entre 5% à 22% de la population, dont un nombre plus important de femmes. Les maladies inflammatoires chroniques de l´intestin ou MICI (maladie de Crohn et rectocolite hémorragique) ont des conséquences plus lourdes pour la santé et le bien être. Dans ces maladies, on observe une inflammation de la paroi du tube digestif. Dans ces deux cas, on observe souvent une diminution de la diversité et/ou de la quantité de bactéries du microbiote intestinal. Une relation de cause à effet reste à démontrer, mais la prise de probiotiques soulage souvent (mais que temporairement) les symptômes.

Notre alimentation sert à nous nourrir et à nourrir notre microbiote. Ce sont les prébiotiques tels que les sucres des fruits ou du lait, les fibres solubles ou insolubles des plantes que l’on mange et que nous ne sommes pas en mesure de digérer qui est la nourriture favorite des bactéries de notre intestin. En échange, le microbiote nous protège des micro-organismes pathogènes et produit de substances utiles à notre corps (certaines vitamines comme la vitamine K2).

Nous sommes obsédés par les risques que représentent une minorité d'espèces bactériennes pathogènes, oubliant que, dans leur immense majorité, elles sont bénéfiques et indispensables à la vie. L´abus d'antibiotiques, l´excès d'hygiène, l´utilisations des pratiques agricoles et alimentaires intensives (l’usage invétéré d’antibiotiques dans des animaux d’élevage par exemple) risquent de détruire notre microbiote et notre santé!

Maria Sol Rodriguez Pena, MD, PhD. Biochimiste clinique. Spécialiste en nutrithérapie
Marc D. de Smet, MD, CM, PhD, FMH Ophtalmo-chirurgien